Un trafic d’engrais frelaté

08 juillet 2015

Mali

Une affaire scandaleuse de trafic d’engrais frelaté vient d’éclater au Mali. Chaque année, à l’occasion de la campagne agricole la CMDT (Compagnie malienne pour le développement des textiles), majoritairement détenue par l’État malien, importe des engrais, qu’elle distribue par la suite aux paysans afin d’augmenter la production du coton dans le pays.

Pour cette année-ci la CMDT en aurait importé environ 40 000 tonnes, mais le service chargé de contrôler la qualité de ces engrais a découvert qu’une grande partie de ce produit était « périmé », voire « frelaté ».

La presse malienne relayée par certains élus des partis d’opposition, a ébruité le scandale et dénoncé l’existence d’une « maffia des engrais » au Mali. Le chiffre d’une « perte de 27 milliards de francs CFA » a même été avancé par un député proche du pouvoir.

Un trafic d’une telle ampleur existe probablement depuis plusieurs années et ne pourrait probablement pas avoir lieu sans la complicité de la haute sphère de l’appareil d’État.

Dans un premier temps, les deux ministères directement impliqués (celui de l’Agriculture et celui du Développement rural) ont tenté d’étouffer l’affaire, mais ils n’y ont pas réussi. Ce n’est qu’après que le scandale a été dévoilé dans la presse locale, que les ministres concernés ont fait semblant d’ouvrir une enquête pour chercher le ou les coupables. Le Président malien y est allé aussi de son couplet en déclarant qu’il sera « sans pitié et intraitable » contre d’éventuels fautifs car selon lui « c’est une question de Santé publique, de morale et d’éthique ».

Le pouvoir malien s’est gardé jusqu’ici de dévoiler la nature exacte de cet engrais frelaté. S’agit-il seulement d’engrais « périmé » comme semble l’affirmer le ministre de l’Agriculture ou de produits toxiques (engrais et pesticides) comme semble l’insinuer la presse d’opposition ? Quelles seront les conséquences de ces produits sur la santé des petits paysans et des ouvriers agricoles qui vont les manipuler ? Quelles seront les conséquences sur la santé des villageois vivant autour des champs sur lesquels on aurait répandu ces produits ? Jusqu’à présent, aucune mesure préventive n’a été prise par les autorités publiques.

Ce n’est pas la première fois qu’un trafic d’engrais a lieu au Mali. Certains journaux ont rappelé que lors de la campagne du riz de 2008-2009, plusieurs milliards de francs CFA avaient été détournés par cette « maffia des engrais » liée au pouvoir.

Le Président malien IBK, n’occupe le poste de la Présidence que depuis Août 2013, mais il a déjà à son palmarès de nombreux faits de détournement de fonds publics, notamment autour de l’achat d’un nouvel avion pour ses déplacements. Il en est de même autour de l’achat d’armes et de divers matériels et engins destinés à l’armée malienne. Il s’est illustré aussi par la nomination de son propre fils et de quelques membres de sa famille dans les postes lucratifs. Alors quand ce président parle de «morale et d’éthique » on sait ce qu’il faut entendre par-là.