Troupes françaises et armée malienne, ennemies des travailleurs et des populations pauvres
MALI
On assiste actuellement à une sorte de bras de fer, pour le moment verbal, entre les dirigeants de l’État français et les putschistes maliens. Dans son discours au siège de l’ONU à New York, le Premier ministre malien Choguel Maïga a critiqué en qualifiant d’« abandon en plein vol » la décision d’Emanuel Macron de retirer prochainement la force Barkhane du Mali. De son côté, le président français a qualifié la déclaration de Choguel Maïga d’« inadmissible » et de «honte».
Les dirigeants de l’impérialisme français veulent un pouvoir docile et marchant au pas au Mali tandis que le colonel Goïta et ces acolytes putschistes voudraient que la France s’implique davantage militairement pour les aider à combattre les groupes armés djihadistes et autres qui sèment la terreur dans une partie de plus en plus grande du territoire malien, mais aussi le mouvement indépendantiste touareg au nord du pays. Mais le problème est que les objectifs de l’impérialisme français ne sont pas les mêmes que ceux des dirigeants maliens, notamment par rapport au mouvement indépendantiste touareg de l’Azawad.
Depuis que Macron a annoncé en juillet dernier qu’il allait retirer rapidement ses soldats de ses positions au nord du Mali (Kidal, Tombouctou et Tassalit), réduire ses effectifs de 5000 actuellement à 2 500 ou 3 000 d’ici 2023 et les concentrer vers le Niger et la zone dite des Trois frontières (Mali-Burkina Faso-Niger), les autorités maliennes ont pris contact avec la Russie de Poutine pour bénéficier des services des mercenaires de la société russe Wagner, la même qui sévit en Centrafrique, en Libye et en Syrie.
Cette annonce du gouvernement malien n’est pas du goût des dirigeants français qui menacent de retirer toute aide au Mali si ses dirigeants maintiennent leur projet de recourir à Wagner. En attendant, les putschistes maliens tentent de mobiliser leurs partisans en organisant des meetings au cours desquels les orateurs dont des partisans de la mouvance du chef religieux Bouyé Haïdara connu par son titre de « chérif de Nioro », prononcent des discours nationalistes anti-Macron et haranguent la foule pour soutenir le pouvoir en place. Certaines personnes portent le drapeau malien à côté du drapeau russe, des portraits de Poutine ainsi que des pancartes avec le slogan « Vive Poutine ».
Les putschistes au pouvoir essaient de s’appuyer sur un sentiment réel qui existe au sein de la population malienne qui est de se méfier, à juste raison, du discours officiel du gouvernement français prétendant qu’il veut « aider le Mali » alors que ses intentions sont autres. Mais la méfiance de la population envers les putschistes est aussi réelle car elle a assisté à de nombreux coups d’États depuis l’indépendance et ils n’ont rien apporté de positif sinon une succession de dictatures. La corruption, le racket, les coups de matraques et les assassinats politiques n’ont jamais cessé.
La place de l’armée dans la vie politique n’a fait que se renforcer. Ainsi, le nombre de généraux qui était de 7 sous Modibo Keita, le premier chef d’État après l’indépendance du Mali, dépasse aujourd’hui les 150. Après chaque coup d’État ou chaque changement de président issu d’une élection, leur nombre ne cesse de croître car le nouvel arrivant au pouvoir ne fait confiance qu’à ceux nommés par lui.
Ces généraux mènent un train de vie de pacha aux frais de l’État et s’enrichissent par la corruption, les détournements de fonds, le racket à grande échelle, le trafic et business de tous genres, y compris de la drogue. Certains d’entre eux sont devenus des milliardaires en francs CFA et figurent dans le palmarès des grandes fortunes du Mali. Ils sont plus préoccupés par l’épaisseur de leurs comptes en banque que par leur engagement dans la lutte contre les groupes armés terroristes qui sévissent au nord comme au sud du pays. Alors, la population malienne à raison de se méfier de la présence de l’armée française au Mali ainsi que de l’armée malienne elle-même.
Contrairement à ce que prétendent les dirigeants de l’État français, leur armée n’est pas venue au Mali pour défendre les populations maliennes contre les mouvements terroristes mais pour défendre les intérêts économiques et géopolitiques de la bourgeoisie française. L’impérialisme français a d’énormes intérêts dans cette vaste région sahélienne allant du Tchad à la Mauritanie en passant par le Niger, le Burkina Faso et le Mali, notamment en matières premières minières et agricoles, mais aussi dans d’autres secteurs comme les infrastructures, la téléphonie, le commerce, la banque, etc.
D’autres puissances convoitent ces richesses et sont tentées de profiter de cette situation d’instabilité politique régionale pour s’y engouffrer mais l’impérialisme français veut protéger son pré-carré hérité de la colonisation. Son problème est qu’il ne veut pas s’enliser dans le bourbier malien.
Devant ces enjeux énormes, l’armée malienne ne pèse pas lourd, d’autant moins que la population malienne, notamment hors de Bamako, la considère plutôt comme une force d’oppression plus proche du gangstérisme et aussi redoutable envers les petites gens que les groupes armés terroristes qu’elle est censée combattre.
Les travailleurs maliens de l’émigration comme ceux restés au pays n’ont aucun intérêt à se laisser embarquer dans l’ambiance nationaliste que le pouvoir malien tente de créer pour trouver des appuis au sein de la population malienne. Ils doivent aussi rejeter le discours angélique de Macron sur la démocratie, le respect des institutions ou sa prétendue lutte contre le terrorisme au Mali. Les uns et les autres sont des ennemis mortels des travailleurs et des populations pauvres.