Le gouvernement refuse d’indemniser les victimes du régime de Habré
Tchad
Dans un communiqué publié le 23 octobre dernier à Nairobi au Kenya, quatre organisations de défense des droits humains ont dénoncé le fait que le gouvernement tchadien n’a toujours pas exécuté la décision de justice de 2015, ordonnant réparation à plus de 7.000 victimes de crimes graves commis durant le régime de l’ancien dictateur tchadien Hissène Habré. Elles invitent les autorités à appliquer rapidement cette décision.
En effet, il y a quatre ans, en mars 2015, la Cour d’appel de Ndjaména a condamné 20 agents du régime de Habré pour assassinats, tortures, séquestrations, détentions arbitraires, etc. Cette Cour a également accordé aux 7.000 victimes la somme de 75 milliards de francs CFA (environ 140 millions de dollars) à titre de dommages et intérêts, ordonnant au gouvernement de payer la moitié, et aux 20 agents condamnés, l’autre moitié.
Un an plus tard, Habré lui-même a été reconnu coupable (en 2016) de crimes contre l’humanité, de crimes de guerre et de torture, et notamment de viols et de violences sexuelles, par un tribunal spécial au Sénégal et condamné à la prison à perpétuité. Une chambre d’appel a confirmé cette condamnation en 2017, et a accordé la somme de 82 milliards de francs CFA (environ 153 millions de dollars) aux 7 396 victimes désignées. Elle a également donné mandat à un Fonds de l’Union africaine pour collecter les avoirs de Habré, et en sollicitant d’autres contributions. Mais à ce jour, à Ndjaména comme aux instances de l’Union africaine, les victimes et les parents des victimes n’ont reçu aucun centime de réparations.
Les victimes n’ont pas baissé les bras. Ils ont à nouveau manifesté cette semaine à N’Djamena (notamment le 14 octobre, en bloquant la circulation dans une avenue) pour maintenir la pression et réclamer le paiement des dommages et intérêts qui leurs ont été accordés par la justice.
Rappelons que le régime dictatorial de Habré (1982-1990) a été marqué par des atrocités massives et généralisées. Les documents de la DDS (la police politique de l’ancien dictateur Habré) retrouvés par Human Rights Watch en 2001 ont révélé que 1.208 personnes ont été sommairement exécutées ou décédées en détention, et 12.321 autres ont subi des violations atroces.
En 1990, Habré a été renversé par l’actuel dictateur Idriss Déby, qui était son bras droit et exécuteur de ses basses besognes. Habré s’est réfugié au Sénégal avec la complicité du gouvernement français.