Le chantage de Rio Tinto

29 novembre 2019

Madagascar

Rio Tinto est une société multinationale d’extraction minière qui est présente à Fort-Dauphin dans l’extrême Sud-est de Madagascar, depuis 21 ans. Par l’intermédiaire de sa filiale QMM elle soutire à partir des sables marins situés en bordure de côte, différents minerais dont les principaux sont l’ilménite (10% du marché mondial), mais aussi du titane, du zircon, minerais très recherchés par l’industrie mondiale. L’État malgache détient 20% du capital de QMM. Aujourd’hui les dirigeants de Rio Tinto se livrent à un véritable chantage à l’égard du personnel de cette mine : soit l’État malgache participe à la recapitalisation en versant l6 millions de dollars, soit Rio Tinto s’en prend aux conditions de travail et aux salaires du personnel. Selon ce géant de la mine, sa filiale malgache éprouverait des difficultés financières liées au ralentissement de l’économie mondiale consécutivement à la crise et donc moins demandeuse parait-il, de ces minerais.

À l’échelle planétaire, cette firme continue à engranger des bénéfices puisque des sommes colossales sont versées à ses actionnaires sous forme de dividendes. Non seulement l’État malgache ne toucherait plus rien, mais au contraire il serait tenu de verser les sommes exigées par Rio Tinto. Les dirigeants malgaches disent que leurs caisses sont vides. Un conseil des ministres vient d’avoir lieu et le gouvernement a fait savoir qu’il envisage de procéder à un audit sur la comptabilité de QMM. En fait ce ne sont que des gesticulations destinées à faire lanterner les travailleurs de cette mine ainsi que ceux d’autres mines appartenant à d’autres patrons. Il y en a une très importante, de nickel et de cobalt à Ambatovy, localité située dans le Centre-est. Il y a aussi celle de Toliara (dans le sud-ouest), dont le début de la mise en service a été repoussé à cause de la colère des villageois menacés par l’accaparement de leurs terres ancestrales et de leurs lieux de subsistance. Le ministre des mines fait des va-et-vient dans ces endroits pour désamorcer des foyers de tensions éventuels.

Les gouvernements qui se sont succédé sont corrompus et veules face au patronat. Andry Rajoelina le président actuel ne fait pas exception. Ce n’est pas la 1ère fois qu’il dirige le pays et il a aussi exercé la fonction de maire de la Capitale. Lui et son clan se sont considérablement enrichis au passage en l’espace de quelques années. Tout le monde sait que les dirigeants puisent dans les caisses de l’État et se font « graisser les pattes ».

Ce n’est pas la première fois que les exploiteurs capitalistes se comportent de cette façon à travers la planète, surtout lorsqu’ils ont affaire à des pays pauvres, donc à leurs yeux, vulnérables. Au Tchad par exemple, des richissimes compagnies pétrolières qui exploitent les gisements du pays se sont débrouillées pour, non seulement arrêter de verser les sommes dues, mais au contraire de réclamer de l’argent à l’État. Selon les dirigeants de ces compagnies et selon leurs propriétaires, il n’y aurait pas assez de «valeur ajoutée », c’est-à-dire de profit réalisé.

Il y a de la colère chez beaucoup de travailleurs de nos pays. Et si à cette colère s’ajoute la conscience et l’organisation, ce seraient peut-être les seules choses que les exploiteurs capitalistes et les dirigeants n’auront pas volées.