La population pauvre livrée à elle-même face aux ravages causés par le cyclone Freddy
Madagascar
En l’espace d’une année, trois cyclones ont frappé la Grande Île. Le dernier en date, nommé Freddy, s’est abattu avec force sur la côte sud-est du pays, principalement sur le district de Mananjary. Il est difficile de donner des chiffres exacts, certains journaux font état de 40 mille sinistrés, de plusieurs dizaines de milliers de déplacés, d’une quarantaine de décès, sans compter les blessés. Près de 8 000 habitations ont été endommagées.
Étant donné que même en temps ordinaire, une partie importante de la population n’est pas recensée faute de moyens, ces personnes n’ont pas d’existence légale aux yeux des autorités. Dans ce cas où aller ? À quelle porte frapper pour ne serait-ce que trouver quelque chose à se mettre sous la dent et/ou un lambeau de friperie pour cacher sa nudité ? Tout cela au milieu des vents et des trombes d’eau en furie.
Andry Rajoelina en précampagne électorale
Dans environ 9 mois auront lieu l’élection présidentielle. Le président, qui n’a pas encore officialisé sa candidature, est allé au chevet des victimes de cette catastrophe. Il a apporté 50 tonnes de riz, 5 tonnes de légumineuses, 2 000 couvertures, 2 tonnes de farine, fourni quelques ambulances et des motos pour les services administratifs. Autant dire des broutilles par rapport aux besoins des victimes.
En fait ce qu’il est en train de faire c’est de la démagogie à bas coût. Son cynisme l’emporte sur le dérisoire. Il n’a même pas honte de se faire filmer par les caméras de la télévision, en train de servir quelques assiettes de nourriture, payée non pas par l’État, mais par une institution religieuse. Les pontes condescendants d’une chefferie religieuse avaient, pour la circonstance, retroussé leurs manches dans la foulée du Président.
À un micro, Rajoelina a déclaré : « Certains disent que je suis un serveur. Je leur dis oui car je suis un serviteur du peuple ». Le 24 février dernier il a déclaré : « J’ai été élu maire d’Antananarivo. Moi, à chaque fois que je me présente à une élection, je suis toujours élu. Et si je me présente à la prochaine élection, je serai réélu ».
Comme à son habitude, le chef de l’État a fait des promesses en veux-tu en voilà : réalisation d’un hôpital « manara-penitra » (pour gens déshérités), réhabilitation de la Route Nationale N°11, d’un pont endommagé, de la salle des fêtes, des locaux administratifs endommagés etc.
Il a participé au « tagnamaro » (mise en commun des bras de tous) en versant personnellement quelques pelletées de béton. À charge, selon lui, pour la population locale de poursuivre les travaux sans percevoir de rémunération.
Sombre week-end dans une grande partie de l’île
Dans la région du Sud-ouest, des précipitations importantes sont prévues car cette tempête tropicale Freddy est en train de faire son retour en force après avoir frappé la côte africaine au niveau du Mozambique.
À Toliara, chef lieu de province, la rivière Fiherenana va d’après la météo, sortir de son lit. C’est une catastrophe annoncée pour les habitants de cette ville et pour tous ceux des contrées avoisinantes. La pluie est certes bienvenue, mais elle va provoquer des inondations violentes avec toutes sortes de dégâts. Les scènes de désolations pourraient être comparables à celles de la côte sud-est.
Dans la capitale Antananarivo, ce sont surtout les rues d’Isotry, d’Anosibe et d’autres quartiers situés dans la ville basse et marécageuse qui vont charrier des torrents d’eaux sales chargés de détritus.
C’est précisément dans ces lieux que les travailleurs habitent à cause de la cherté des loyers ailleurs, inabordables par rapport à leurs faibles moyens. En effet le patronat rapace leur impose des salaires de misère, non ajustés par rapport à l’inflation galopante. Ils sont en moyenne inférieurs à 50 000 Ariary. Ce qui correspond au taux monétaire actuel à moins de 50 euros par mois. Quelques uns parmi les ouvriers réussissent à dégotter une habitation précaire située dans la ville haute mais à flanc de colline, avec le risque d’être ensevelis par les glissements de terrains, nombreux en cette période. D’autres élisent domicile sur les trottoirs ou à l’intérieur des tunnels du centre ville.
Les travailleurs représentent potentiellement une force très importante, capable d’arracher des augmentations conséquentes de salaires pour tous. Ils sont en droit d’exiger que l’État ainsi que les employeurs débloquent les moyens nécessaires afin que personne n’ait à passer des nuits dehors, surtout en cette saison de tempêtes tropicales.