État d’urgence sanitaire et chasse à l’opposant

25 janvier 2021

SÉNÉGAL

Au moins six personnes ont été arrêtées au Mali depuis le 21 décembre dernier. Elles sont accusées de « complot », de « tentative de déstabilisation » et « atteinte à la sûreté de l’État ». Parmi ces personnalités il y a le chroniqueur de radio connu par le public sous le nom de Ras Bath, réputé pour son franc-parler et ses positions critiques contre le pouvoir. Il y a aussi deux dirigeants d’entreprises et des politiciens proches du régime de l’ancien président IBK renversé par le coup d’État militaire du 18 août 2020. L’ancien Premier ministre Boubou Cissé fait aussi partie de la liste des personnes recherchées mais « introuvables ».

Moins de cinq mois après son arrivée au pouvoir par un coup d’État, le comité militaire dirigé par Assimi Goïta est visiblement déjà essoufflé et a peur d’être renversé à son tour. Certes, il a encore le soutien de l’imam Dicko et des politiciens appartenant à sa mouvance islamiste réactionnaire en échange de quelques strapontins et autres sinécures, mais dans la population il n’est plus perçu comme le « sauveur du Mali » qui allait tout changer.

La dictature et le clientélisme du nouveau pouvoir apparaissent de plus en plus au grand jour. Ceux qui croyaient que le nouveau pouvoir allait mettre fin à la corruption et à la dilapidation des caisses de l’État en ont eu pour leurs frais, de même que ceux qui croyaient que le nouveau pouvoir allait mettre fin à la domination de l’impérialisme français au Mali. Mais l’armée française y est toujours présente à travers, la force Barkhane, la Minusma et le G5-Sahel. Faut-il rappeler que lors des grandes manifestations qui ont précédé la chute du régime d’IBK, de nombreux manifestants réclamaient le départ des troupes françaises et la fin de l’insécurité notamment dans le nord et le centre du Mali ? Quant à la situation des habitants qui vivent sous la terreur des milices armées, rien n’a changé.

De plus en plus de gens s’aperçoivent que la principale préoccupation de ceux qui ont renversé le régime honni d’IBK c’est l’accaparement des postes au sein de l’appareil d’État. C’est la même soif du pouvoir et des privilèges et c’est aussi la même dictature qui continue. Ceux qui osent les critiquer sont poursuivis comme des comploteurs. Les journalistes et les réseaux sociaux sont particulièrement surveillés. L’état d’urgence sanitaire a été de nouveau instauré sous prétexte de « faire barrage » à la propagation du corona virus, mais en réalité c’est pour permettre à l’armée de museler encore plus les opposants et instaurer un climat de peur au sein de la population qui souffre de plus en plus de la crise économique et des conséquences des mesures sanitaires impopulaires et inefficaces.