Renforcement de l’arsenal juridique pour museler la contestation

14 juillet 2021

SÉNÉGAL

 

Après avoir violemment réprimé les grandes manifestations du mois de mars dernier, avec au moins 14 manifestants décédés et plusieurs autres blessés et arrêtés, Macky Sall croyait peut-être qu’il avait réussi à terroriser et à paralyser pour une longue période ceux qui contestent son pouvoir et surtout son envie de briguer un troisième mandat présidentiel alors que la loi actuellement en vigueur ne le permet pas. Force est de constater que malgré les violences policières et les intimidations de tous genres contre certains leaders de la contestation, celle-ci est bien vivante et active, n’en déplaise à Macky Sall et à ceux qui avec lui croient que le pouvoir est à eux pour longtemps et qu’ils peuvent tranquillement s’enrichir en contrôlant les caisses de l’État et en mettant leurs proches et leurs familles dans les postes les plus lucratifs de l’appareil d’État.

La dernière trouvaille de Macky Sall pour faire taire la contestation de rue c’est la nouvelle loi qu’il a fait voter en procédure d’urgence le 25 juin dernier, sous prétexte de lutte contre le terrorisme. Cette loi liberticide vise à criminaliser les marches et les rassemblements qui pourront être dorénavant considérés comme des actes de terrorisme et passibles de réclusion criminelle à perpétuité s’ils menacent de « troubler gravement l’ordre public ou le fonctionnement normal des institutions ».

Une partie de l’opposition, notamment les partisans d’Ousmane Sonko et les militants des mouvements tels que « Y’en a marre », Frapp-France Dégage (Front pour une révolution anti-impérialiste populaire et panafricaine) ou M2D (Mouvement pour la défense de la démocratie) ont manifesté pacifiquement le jour du vote de la loi liberticide, leurs dirigeants ainsi que le rappeur Nit Doff ont été embarqués immédiatement par la police.

En faisant voter une telle loi, le gouvernement menace l’ensemble des travailleurs qui demain, s’ils font grève et manifestent dans la rue contre les bas salaires, les mauvaises conditions de travail, de logement, de transport, ou contre les coupures d’eau et d’électricité, le délabrement des hôpitaux et des écoles publiques, etc., pourraient être considérés comme des terroristes.