Éditorial

Qui sème le vent récolte la tempête !

09 mars 2024

Le 21 février dernier, le gouverneur de la ville d’Abidjan fraichement nommé, a décidé de s’en prendre une seconde fois à Gesco, un quartier pauvre situé à l’extrême nord de la ville pour le démolir et jeter ses habitants dehors. Ce gouverneur connu pour sa brutalité et son mépris ostentatoire des populations pauvres ne savait pas encore que cette fois-ci, il allait tomber sur un os.

 Nuitamment, comme des voleurs, les bulldozers escortés par un impressionnant dispositif de forces de l’ordre ainsi que des loubards ont surpris les habitants dans leur sommeil. Les habitants n’ont même pas eu le temps de sauver leurs affaires. On leur a intimé l’ordre de sortir de leur maison et les bulldozers ont aussitôt entamé leur sale besogne en broyant sous les chenilles les maisons, sans que les gens aient pu ramasser leurs affaires.

 Une école de près de deux mille élèves n’a pas été épargnée en pleine année scolaire. Des vies ont été détruites, le fruit de tant d’années d’efforts et de sacrifices réduit à l’état de gravats, des élèves jetés à la rue. Nombreux sont les habitants qui étaient en pleurs et dans le désarroi. Mais très vite, ce désarroi va céder la place à la colère et cette fois-ci elle va se manifester.

 Ainsi, après avoir été pris au dépourvu dans un premier temps, les habitants ont manifesté spontanément pour empêcher la continuation de la démolition de leur quartier. Ils ont bravé les nombreux corps habillés et loubards envoyés par les autorités pour les intimider. Ils ont bloqué l’autoroute du nord à l’aide de barricades et de pneus brulés. Face aux gaz lacrymogènes, les manifestants ont répondu par des jets de pierres. Il s’en est suivi des courses-poursuites entre corps habillés et manifestants jusqu’à tard dans la nuit. Mais cette répression n’a pu arriver à bout de la manifestation. Le lendemain, les manifestants étaient encore là, plus nombreux que la veille. Un véhicule de la mairie venu distribuer des sacs de riz au moment où les gens se faisaient jeter dehors, a été caillassé. Là encore les échauffourées ont duré toute la journée.

 Voyant que la situation devenait intenable, les autorités ont dû reculer en suspendant leur opération de déguerpissement. Certes, la mobilisation des habitants a permis de stopper net, les démolitions, mais personne n’est dupe car ce n’est que le calme avant la tempête. Plus personne ne croit aux mensonges et aux paroles mielleuses des politiciens promettant de les protéger. Aujourd’hui ils savent que la mobilisation est la seule voie pour faire barrage à toute nouvelle démolition. Des petits comités de surveillance ont même été mis en place pour éviter d’être surpris de nouveau par des bulldozers dans la nuit.

 Les habitants de Gesco montrent la voie à suivre.