Éditorial

Pendant que les possédants se frottent les mains…

25 septembre 2017

ÉDITORIAL

C’est avec fierté que le ministre de l’Economie a présenté les prétendues performances économiques de son gouvernement devant un parterre de représentants des grandes institutions financières et des capitalistes.

Selon le document qui leur a été présenté, il est dit que le taux de croissance de l’économie ivoirienne est de 9% en moyenne depuis 2012 ; qu’en ce qui concerne le secteur du bâtiment et des travaux publics, ce taux de croissance serait passé de 12 % en 2011 à 25,8% en 2015 ; que la production des cultures industrielles (café, cacao, hévéa, palmier à huile, coton, anacarde) a augmenté de 50% entre 2010 et 2015 ; que la production vivrière a aussi augmenté de 50% au cours de la même période ; que la production de l’électricité a progressé de 36,5 % ; que le nombre de médecins par habitant a augmenté de 100% (passant de de 0,63 à 1,38 médecins pour 10.000 habitants entre 2010 et 2015 ; que la quasi-totalité des 31 chefs-lieux de région sont alimentés en eau potable.

A croire ces gens-là, tout va très bien dans ce pays et tous les habitants profitent des bienfaits de leur croissance. Mais pour ceux qui produisent toutes ces richesses, à savoir les travailleurs, les petits employés, et les petits paysans, eux ils continuent de vivre dans la misère. Leur sort ne cesse de s’aggraver depuis 30 ans.

La croissance moyenne de 9% affichée depuis 2012 s’est-elle traduite par au moins autant d’augmentation sur les fiches de paie des ouvriers ? Bien sûr que non. Au niveau du bâtiment et des travaux publics, la situation des travailleurs ne s’est pas plus améliorée. Là où elle l’est, c’est uniquement au travers des luttes qu’ils l’obtiennent. Même là, le plus souvent, c’est le temps que dure un chantier. Ils sont ensuite obligés de reprendre la lutte sous peine de retrouver leur situation antérieure.

La grande majorité de la population ne mange pas plus de produits vivriers depuis 2010, tellement la vie est devenue chère.

L’augmentation de production des cultures industrielles de 50 % n’a pas permis d’améliorer la vie des ouvriers agricoles et des petits paysans. Les prix bord-champ ont globalement chuté, les rendant encore plus pauvres, en contrepartie d’un travail plus grand. Ils ne disposent plus de temps pour se consacrer à un potager afin de satisfaire leurs propres besoins en production vivrière, ce qui les rend encore plus pauvres et plus vulnérables aux aléas de la spéculation mondiale.

La qualité de l’électricité distribuée dans les quartiers pauvres d’Abobo et de Yopougon ne s’est pas améliorée ; il y a autant de coupures de courant qu’avant.

L’eau potable n’est pas plus accessible dans les bas quartiers d’Abobo et de Yopougon. Il y a des familles qui dépensent autant d’argent pour accéder à l’eau que pour leur loyer, sachant qu’un bidon de 25 litres leur est le plus souvent livré à 100 Fr  par les vendeurs ambulants.

Sur le plan de la santé publique, le bas revenu des travailleurs ne leur permet pas aujourd’hui un meilleur accès à la santé qu’en 2010, même si le gouvernement affirme que le nombre de médecins et de centres de soins publics a augmenté.

C’est cette réalité-là que vit l’écrasante majorité de la population pendant que nos gouvernants se vantent de leurs « performances ». Nous vivons dans un monde capitaliste. C’est un système ignoble bâti autour de la recherche du profit à tout prix pour la minorité de ceux qui possèdent des capitaux. Toute l’économie mondiale fonctionne selon cette même logique, la Côte d’Ivoire ne constitue qu’un petit maillon de cette chaine qui étrangle toute la planète.

Partout dans le monde, ceux qui produisent les richesses, ceux qui font tourner les machines, ceux sans qui rien ne fonctionnerait, sont à la merci de ceux qui les exploitent, de ceux qui possèdent les capitaux et qui ont droit de vie et de mort sur des dizaines, des centaines de millions de personnes. Mais ce n’est pas une fatalité. Le monde ne peut pas tourner de la sorte indéfiniment.

Le sort des travailleurs et de l’ensemble des exploités dépend d’eux-mêmes, de leur capacité de s’organiser, de lutter pour renverser le système capitaliste. L’avenir de la société est dans la mise en commun de toutes les richesses et les moyens de production pour qu’enfin l’économie tourne non plus en fonction des besoins de la minorité de parasites et d’exploiteurs mais pour le bien commun de la grande majorité.