Éditorial

Nouvelle constitution ou pas, les travailleurs n’ont rien à attendre

19 octobre 2016

Éditorial

La population est appelée à voter pour une nouvelle Constitution. Celle-ci est présentée par Ouattara (avec l’appui de Bédié) comme l’alpha et l’oméga de la «Nouvelle Côte d’Ivoire ». Comme nouveauté, il y aura un poste de vice président qui assurera la présidence par intérim en cas de vacance de pouvoir ; il y aura également un Sénat dont le tiers des membres sera désigné directement par le président. A côté de ce Sénat est prévue une « Chambre des rois » où siégeront des roitelets locaux traditionnels. Autant de postes seront créés pour gaver le camp présidentiel et éventuellement pour acheter quelques « opposants » afin qu’ils puissent gesticuler et parader pour faire croire que la Côte d’Ivoire est une démocratie.

Il n’y a, parait-il, pas d’argent pour arranger les quartiers insalubres où habitent les pauvres (quand ils ne les détruisent pas à coups de bulldozer), mais il y en a assez pour engraisser quelques parasites de plus !

L’âge limite de 75 ans pour se présenter à l’élection présidentielle a été supprimé. Or Ouattara a actuellement 74 ans ; c’est ce qui fait dire à Pascal Affi N’Guessan, l’ancien Premier ministre de Laurent Gbagbo, que « … ce point de la Constitution a été écrit pour que M. Ouattara puisse se représenter en 2020 » ; de même que, toujours selon le même Affi N’Gussan, le poste de vice-président « a été créé pour Henri Konan Bédié ».

Personne ne connaît « les intentions cachées » de Ouattara. Ce qui est sûr, c’est qu’il est un politicien comme tant d’autres dans ce pays, qui ne fait rien sans rien. Il est capable de tripatouiller la Constitution pour assouvir ses ambitions de pouvoir et en même temps favoriser son entourage. Il n’est pas le premier à l’avoir fait. On se souvient qu’en 2000, feu Robert Guéi a pratiqué le même genre d’opération de tripatouillage pour écarter Bédié et Ouattara de la course à la mangeoire, mais il a été mal inspiré puisqu’un quatrième crocodile lui a finalement ravi la place : la marre était trop petite pour autant de reptiles affamés !

Selon Ouattara cette nouvelle Constitution (où il a ôté une partie des anciennes conditions requises pour valider une candidature à la présidence) mettra fin à toute forme de division et de discrimination entre les ethnies et permettra d’«assurer la paix et la prospérité à la Côte d’Ivoire pour les années à venir ». Non, cette nouvelle constitution ne préservera pas la population, pas plus que dans le passé, du poison de la xénophobie et de la haine interethnique que ces politiciens sont capables de semer dans leur course à la mangeoire ! Elle n’empêchera pas des bandes de milices de se constituer pour commettre des tueries, semblables à celles que nous avons déjà vues dans un passé récent !

Les travailleurs n’ont aucun intérêt à se laisser berner par le discours mielleux de Ouattara tout comme ils doivent se méfier des politiciens de l’opposition qui nous disent qu’il ne faut pas toucher à la Constitution. Que celle-ci soit modifiée ou pas cela ne changera pas le sort des travailleurs, ni dans un sens ni dans un autre. La seule chose sur laquelle les travailleurs peuvent compter pour améliorer leurs conditions d’existence, c’est leur propre mobilisation. Leur nombre et leur place dans le fonctionnement de l’économie de ce pays est le seul atout sur lequel ils peuvent compter pour imposer leur droit à une vie digne et décente. C’est la conscience de leur force et du rôle qu’ils peuvent jouer dans la transformation de la société qui leur fait actuellement défaut.