Le quotidien des travailleurs – La situation des travailleurs doit changer
Dans les zones industrielles, les usines, les chantiers et les docks, la situation des travailleurs continue de se dégrader jour après jour. Embauchés permanents ou journaliers, les travailleurs vivent les mêmes conditions difficiles de travail et des lendemains incertains. Ci-dessous le témoignage de deux ouvriers.
Travailleur à Gandour, zone industrielle de Yopougon…
« J’ai eu 20 ans cette année et l’année dernière encore j’étais lycéen. Cela fait 3 mois que je suis journalier à Gandour dans la zone industrielle de Yopougon. Mon contrat sur le papier doit durer 11 mois et non renouvelable, mais rares sont ceux qui vont jusqu’à terme. Les petits chefs chargés du recrutement sont trop pressés de choisir de nouvelles têtes parce que chaque nouvelle recrue est obligée de leur verser l’équivalent d’une quinzaine de jours de salaire.
Quand tu commences à l’usine, tu reçois comme équipement, un tee-shirt et un badge qui sont déduits de ta quinzaine. Les chaussures fermées et autres équipements de protection sont à ta charge quelle que soit la section où tu es affecté.
Chaque section au sein de l’usine a ses problèmes. Par exemple, aux produits éclaircissants, les ouvriers sont continuellement exposés aux produits qu’ils manipulent sans protections adéquates. Du coup, plus tu y passes du temps, plus ta peau a tendance à éclaircir. Dans ma section, le travail est très physique. J’ai perdu des kilos dès la première quinzaine.
Pourtant, ce n’est pas la dureté du travail qui nous préoccupe le plus. À Gandour le travail n’est pas toujours garanti. Tu peux effectuer le déplacement et c’est à la porte de l’usine que tu es informé qu’il n’y a pas travail. À la journée ainsi perdue, s’ajoutent les frais de déplacement. Déjà que la paie est limite, alors quand des jours sautent, cela complique la quinzaine suivante.
Je vis encore chez mes parents, mais j’ai des collègues qui sont des pères de famille. Et certaines quinzaines, je me demande comment ils arrivent à joindre les deux bouts avec ce qu’ils ont gagné. »
Travailleur à Filtisac…
« Je suis ouvrier à Filtisac depuis plus de 20 ans dont plus de la moitié en tant que journalier. Cette entreprise fait partie d’un groupe qui est une multinationale dont le siège se trouve en France.
Nos salaires ne sont pas terribles. Ils nous permettent en temps normal de tenir à peine le mois au prix de maintes privations et de sacrifices. Et quand survient un imprévu comme c’est le cas souvent, cela nous plonge dans la spirale de la dette.
Il n’y a pas longtemps, un parent proche est tombé malade. Pour faire face aux dépenses d’urgence, je me suis endetté auprès de ma banque. Maintenant, il me faudra plusieurs mois pour éponger cet emprunt. En attendant, chaque fin de mois est devenue encore plus incertaine.
Ce que je vis actuellement est le lot de presque tous les travailleurs. Même avec un travail régulier, l’ouvrier n’est pas en mesure de se mettre à l’abri du besoin. Il vit à la lisière de la misère. Son travail engraisse ses employeurs et tous les profiteurs qui exploitent sa situation difficile. »
Le cri des canuts, ouvriers de la soie de la ville de Lyon (en France) lors de leur révolte en 1831 sonne plus fort que jamais : « Vivre libre en travaillant ou mourir en combattant. ». Il est impératif que les ouvriers s’organisent pour acquérir dans la lutte leur émancipation «politiquement, intellectuellement et matériellement ». C’est seulement quand la classe ouvrière prendra le contrôle de la société que le travail ne sera plus une « malédiction », mais une source d’épanouissement pour toute la société humaine.