FS-Palmci : une fédération syndicale pour quoi faire ?

01 décembre 2015

La « Fédération des syndicats de Palmci » (FS-Palmci), a organisé son premier congrès le 20 et 21 novembre.

Palmci est la première entreprise en Côte d’Ivoire dans la production et le traitement de la graine de palme. La famille Billon, dont l’un des membres est ministre dans l’actuel gouvernement de Ouattara, en est la propriétaire. Elle possède des milliers d’hectares de plantations de palmiers et aussi de nombreuses huileries réparties dans les différents endroits de production. Cette entreprise emploie ainsi des milliers d’ouvriers agricoles et d’ouvriers d’usines.

Les différents syndicats qui coexistent au sein de cette entreprise auraient ainsi décidé de se donner une direction unique. En effet, cette « fédération » des forces peut être intéressante pour les travailleurs. Mais cela, à condition que cette union soit motivée dans l’objectif de se donner plus de force et être en meilleure capacité de défendre leurs intérêts face à l’exploitation capitaliste qu’ils subissent.

Mais ce n’est manifestement pas le cas pour cette fédération-ci. Autrement, les travailleurs n’auraient pas demandé que le président de ce 1er congrès soit le DG de Palmci lui-même, c’est-à-dire celui qui les exploite. D’ailleurs, ce n’est pas un hasard si aux cérémonies d’ouverture et de clôture du congrès, étaient aussi présents des notabilités dont le maire de Yopougon et d’autres gens de son acabit.

Ce n’était pas non plus un hasard si le thème de ce 1er congrès était : «  quel syndicalisme pour les nouveaux défis de développement ? », autrement dit, en plus clair, « quel syndicalisme pour la défense des intérêts du patron ?».

D’ailleurs, ce n’est tout de même pas pour les beaux yeux des travailleurs que le patron a payé l’hôtel Assonvon durant deux jours, pour la tenue de ce congrès !

Il est vrai que de nombreux travailleurs en Côte d’Ivoire pensent qu’ils se défendraient mieux avec un boss à la tête de leur syndicat.

Mais sans aller dans une caricature grotesque comme ici où c’est carrément le DG qui est mis à la tête d’un syndicat, beaucoup de travailleurs pensent qu’un sous-préfet, un maire, un avocat, un notaire à la tête de leur syndicat serait mieux que s’ils dirigeaient leur syndicat eux-mêmes. Pourquoi ? Parce qu’ils pensent que le fait de porter une cravate, le fait d’avoir une grosse voiture, le fait de posséder l’art de bien parler et d’avoir des bonnes relations, ce boss serait ainsi plus apte à défendre les intérêts des travailleurs devant l’administration, devant l’Inspection du travail, la justice ou la police, en cas de problème.

Les travailleurs de cette entreprise sont loin d’être les seuls à penser ainsi. Le principal syndicat dans ce pays, l’Ugtci, a toujours eu à sa tête un boss. Il a toujours eu de bonnes relations avec le pouvoir et le patronat. Ce n’est pas pour autant que les travailleurs vivent aujourd’hui bien. On peut même dire que c’est exactement le contraire. De plus en plus de travailleurs sont plongés dans la misère, leur vie devient chaque jour plus précaire.

En réalité, c’est le mauvais rapport des forces entre les travailleurs et le patronat qui est la cause de la mauvaise situation actuelle des travailleurs. Pour changer ce rapport en leur faveur, les travailleurs auront à mener des mouvements de grèves, en entrainant toujours un plus grand nombre de travailleurs, au-delà de leur corporation, de leur religion, de leur origine, de leur ethnie, de leur nationalité et de leur appartenance politique. Seuls des travailleurs déterminés, mobilisés et organisés, capables d’attaquer le patronat là où ça lui fait le plus mal, en touchant à ses profits, ont une chance de changer leur vie !

Un boss aussi avenant qu’il puisse être envers les travailleurs, il est en réalité étranger à leurs problèmes. Il ne peut pas comprendre leurs douleurs et leurs souffrances car il ne vit pas le quotidien des travailleurs, c’est-à-dire l’exploitation féroce, les injustices, des conditions d’existence digne de l’esclavage.

Un ancien travailleur qui a vécu cette expérience disait, à propos de ce genre de boss, que les travailleurs, même pour aller le voir dans sa belle villa, doivent d’abord affronter le chien qui garde sa villa. Et celui-ci aboiera d’autant plus fort qu’il sentira l’odeur des pauvres ! Et s’ils parviennent à y entrer, c’est dans l’arrière-cour que ce « groto » les recevra, de peur que ces travailleurs ne viennent salir son salon !

De plus, un riche qui aiderait ainsi les travailleurs aura nécessairement d’autres calculs derrière la tête, pour ses propres intérêts.

Alors, s’ils ne veulent pas se faire rouler dans la farine par les « grotos », les travailleurs ont tout intérêt à ne faire confiance qu’en eux-mêmes, en leur classe sociale. C’est de cette classe sociale exploitée que sortiront les éléments les plus conscients pour bâtir l’organisation qu’il faut à la classe ouvrière pour défendre ses intérêts dans tous les domaines.