Conflit foncier à l’ouest : encore des affrontements

06 novembre 2017

LEUR SOCIÉTÉ

Depuis début septembre 2017, un nouveau conflit foncier a éclaté dans la région forestière de l’Ouest. Des jeunes Wê ont envahi la forêt classée de Goin-Débé pour chasser les « clandestins » en majorité des Baoulé qui y avaient installé leurs plantations. Ceux-ci, refugiés dans un premier temps en ville, vont revenir accompagnés par des Dozos pour déloger ceux qui les ont chassés. Cela va déclencher des affrontements dans d’autres campements et villages. Le bilan est aujourd’hui de deux morts, plusieurs dizaines de blessés et plus de 3 000 déplacés.

Ce conflit est le dernier d’une longue liste. En effet, dans cette région les affrontements entre populations autochtones et allogènes (nom donné aux populations venues d’autres régions de la Côte d’Ivoire ou de pays voisins) ne datent pas d’aujourd’hui. Ils se sont exacerbés avec la rébellion armée de 2002. D’innombrables exactions et massacres ont été commis, par exemple, à Guitrozon et à Petit Duékoué.

Du fait que l’Ouest de la Côte d’Ivoire est très riche en terres fertiles, elle est devenue au fil du temps une région de prédilection pour les cultures d’importation comme le cacao, le café, etc. Elle a donc toujours attiré des agriculteurs venus d’autres régions dont les terres et le climat ne sont pas forcément adaptés à ces types de cultures.

Pour mettre en valeur les forêts, Houphouët avait en son temps décrété que « la terre appartient à celui qui la met en valeur » ; cela avait attiré de nombreux agriculteurs vers cette région forestière. Puis avec l’évolution démographique et la rareté des terres cultivables, les autochtones ont commencé à contester la propriété de ces terres. Elles sont alors arrachées à certains et revendues à d’autres. Chaque nouveau conflit ou affrontement porte les germes du prochain puisque les vrais problèmes ne sont pas réglés.

Mais ce sont ensuite les politiciens démagogues qui vont surfer sur les idées ethnistes et sur les problèmes fonciers pour grappiller des voix. Ils n’ont fait qu’envenimer la situation, exacerber les conflits voire en créer là où ils n’étaient que latents. C’est dans cette région Ouest que la crise postélectorale a fait le plus de victimes. Entre 2002 et 2010, des régions entières étaient sans présence étatique, même les forêts classées ont fini par être défrichées et occupées.

Avec la période électorale qui s’approche, notamment les législatives et la présidentielle en 2020, la démagogie des uns et des autres peut de nouveau attiser la braise et déboucher sur une nouvelle tragédie si la population n’y prend garde.