Chantier du stade olympique : 6 jours de grève pour dénoncer l’exploitation
Le quotidien des travailleurs
Les travailleurs du stade olympique situé dans la commune d’Anyama, ont marqué un arrêt de travail depuis le vendredi 2 mars 2018 pour protester contre le renvoi de leurs porte-paroles au nombre de cinq. Cette grève spontanée dure depuis plusieurs jours et malgré les interventions des forces de l’ordre pour briser la grève, les travailleurs résistent et continuent de bloquer le chantier.
C’est depuis plus de trois mois que ces travailleurs dénoncent les mauvaises conditions de travail. Sur ce grand chantier où les travaux montent en hauteur, et surtout où tout est fait de ferrailles, les mesures de sécurité ne sont pas aux normes. Il manque par exemple des harnachements pour permettre aux travailleurs de s’accrocher au mieux sur les barres de fer. Il manque des chaussures de sécurité pour tous et quand la direction en distribue à quelques travailleurs, elles sont toujours de mauvaises qualités. Les travailleurs sont considérés comme des bêtes de somme. Il n’existe pas de cantine, et les femmes qui s’échinent à préparer les repas pour les ouvriers sont obligées de parcourir plus de 500 mètres pour aller chercher de l’eau de cuisson. De surcroit, elles puisent cette eau dans un endroit insalubre à côté des latrines à ciel ouvert. Donc le risque d’une épidémie de choléra est réel. Bien que cela soit plusieurs fois dénoncé, la direction fait la sourde oreille.
Et depuis octobre 2017, plusieurs grèves ont éclaté sur ce chantier. Les travailleurs ont listé des revendications pour demander une réelle amélioration de leurs conditions de travail. Des réunions ont été organisées par l’Inspection du travail pour trouver une solution négociée. Les patrons ont promis de satisfaire les exigences des travailleurs. Mais c’était des promesses sans lendemain. Ces mêmes problèmes ont provoqué une autre grève en décembre 2017. La direction a profité du fait que les travailleurs n’étaient pas bien organisés pour mettre à la porte leurs représentants. Mais c’était déplacer le problème et non le résoudre.
C’est ainsi que deux mois après, début février, les travailleurs ont déposé une nouvelle liste de réclamations et revendications, le tout appuyé d’un préavis de grève. D’autres séances de négociations ont eu lieu. La dernière en date, le lundi 26 février, l’Inspection de travail a tacitement reconnu le barème du bâtiment et demandé à ce que le syndicat des travailleurs calcule le rappel salaire. Quatre jours après, le vendredi 2 mars, la direction de BCEG renvoya sans motif les cinq porte-paroles des travailleurs. De bouches à oreille l’information du renvoi des délégués circula sur tout le chantier et aux environs de 11 heures tout le travail fut arrêté.
Dans l’après-midi, les travailleurs en grèves font sortir leurs collègues sous-traitants. Le lendemain, ils bloquent tous les entrées du chantier. Au 3ème jour de blocus, le lundi 5 mars, la direction appelle l’Etat à son secours. La gendarmerie arrive et commence à utiliser les gaz lacrymogènes pour disperser les travailleurs. La riposte de ces derniers ne se fait pas attendre. Ils incendient des pneus usés et tentent de couper l’axe Abidjan Adzopé. Dans l’après-midi, les gendarmes débordés font appel à un renfort de police CRS ainsi qu’à la BAE (Brigade Anti-émeute).
La direction de l’entreprise, débordée par les événements, affiche le même jour une note d’information pour indiquer que son chantier est fermé jusqu’à nouvel ordre. Mais comme la majorité des travailleurs n’ont pas encore reçu leur paie de la semaine, ils sont invités à revenir le lendemain pour récupérer leur argent. La journée du mardi 06, a été pareille que celle de lundi : jet de lacrymogène et riposte des travailleurs par l’incendie des pneus. Mais pour donner plus de visibilité à leur mouvement, les travailleurs ont confectionné des pancartes et ont improvisé une marche spontanée en direction de la mairie et de la sous-préfecture. Ils ont été reçus par quelques représentants des autorités locales qui ont promis de faire échos à leur cri de cœur.
Les travailleurs ont constaté de leurs propres yeux que le gouvernement s’est rangé du côté des patrons en faisant intervenir les forces de l’ordre alors qu’ils ne font que réclamer leurs droits. Le gouvernement qui n’a d’oreilles que pour les intérêts des exploiteurs. Les travailleurs ne peuvent compter que sur leurs luttes collectives pour obtenir des améliorations des salaires et des conditions de travail.