Burkina faso : le dictateur est tombé mais une nouvelle dictature militaro civile assure la transition

05 décembre 2014

Burkina faso

Le 31 octobre dernier une insurrection populaire a balayé le régime de Blaise Compaoré. Ce dernier a été évacué par ses militaires et aussi par l’Armée française vers la Côte d’Ivoire avant de trouver un refuge doré à Casablanca au Maroc. Après avoir passé 27 ans à la tête de l’État, il voulait briguer un cinquième mandat par une modification de la constitution.

Les jeunes scolarisés et les étudiants issus des classes pauvres ont dit non à cette dictature et ont réussi à faire tomber Compaoré. Ils ont dit non à son clan qui se pavane dans un luxe insolent, qui ne se déplace que dans des voitures rutilantes acquises avec la sueur et le sang de tous ceux qui produisent les richesses, que ce soit dans les villes ou dans les villages. Ils ont dit non à leur façon en détruisant les édifices qui sont à leurs yeux les symboles de ce régime. Ils ont dit non en mettant à sac la villa de son frère François Compaoré surnommé le « petit président ». Il était un pouvoir dans le pouvoir puisqu’il convoquait des réunions ministérielles à son domicile et faisait tomber la tête de ceux qui n’étaient pas assez dociles à ses yeux. Dans le sous-sol de cette demeure luxueuse, les insurgés auraient découvert des squelettes humains, sans doute ceux de personnes ayant succombé aux tortures de cet homme connu pour sa férocité. Il se croyait intouchable, puisque protégé par son frère à la tête du pays.

Ce clan s’accrochait au pouvoir et ne voulait plus lâcher prise car ce pouvoir lui permettait de s’enrichir et de mener un train de vie insolent pendant que la population croupissait, c’est toujours le cas, dans une situation misérable. Près d’un habitant sur deux doit se contenter d’environ 1000 FCFA par jour pour survivre. C’est la raison pour laquelle des vagues de contestations ont déferlé à plusieurs reprises dans le pays, finissant par l’emporter.

Les capitalistes des grandes puissances, au premier rang desquels il y a ceux de France ancienne puissance colonisatrice, étaient les premiers bénéficiaires de ce système ignoble. Ils étaient peu regardants avec les pratiques des dirigeants locaux, du moment qu’ils pouvaient décrocher des contrats juteux et réaliser des chiffres d’affaires intéressants. En contrepartie de ces marchés, nulle doute qu’ils corrompaient, qu’ils « remerciaient » sous forme sonnante et trébuchante les dirigeants. Ceux-ci prélevaient le complément dans les caisses de l’État, si bien qu’au bout du compte il ne reste pas grand-chose pour les services publics utiles à la population tels que les hôpitaux et les écoles.

Dès que Compaoré est tombé, le lieutenant-colonel Zida numéro deux de sa garde rapprochée, a pris les choses en mains avec l’approbation de la CDEAO, de l’Union Africaine et des représentants des grandes puissances. Compaoré était un de leurs amis et ils n’ont pas fait preuve de la moindre désapprobation sur sa façon de gouverner.

Un des chefs de file de l’opposition, Zéphirin Diabré, n’était, parait-il, pas loin de donner l’accolade au galonné Zida, ce qui en dit long sur ce genre d’opposition. L’objectif prioritaire des différentes composantes dites d’opposition, consiste à quémander quelques postes ministériels et quelques places de députés qui sont en train d’être installés au parlement par le nouveau pouvoir selon son bon vouloir, dans le cadre d’un régime de transition. C’est cette direction étatique qui est en train d’être mise en place pour une période d’un an à l’issue de laquelle des élections, présidentielle et législative, seraient organisées. Cette opposition a élaboré une charte allant dans ce sens et l’a remise bien respectueusement aux militaires installés au sommet de l’État.

Ceux-ci ne cachent pas qu’ils négocient parallèlement avec certains dignitaires du CDP, le principal parti qui soutenait le président déchu, ainsi qu’avec les chefs coutumiers, les représentants des églises ainsi que des notables issus de la « société civile ». Autant dire qu’avec ce pouvoir qui se met en place, pas grand-chose ne changera en faveur des classes pauvres grâce à la mobilisation desquelles le dictateur détesté est tombé.