Éditorial

Au-delà de l’incurie de l’État en matière de lutte contre les inondations, c’est tout le système capitaliste qui est en cause

10 novembre 2019

ÉDITRORIAL

Grand Bassam, Alépé, Dimbokro, Ayamé, la liste ne cesse de s’allonger au fil des journées pluvieuses. Des villages et des quartiers entiers sont inondés. Si jusqu’à présent on dénombre peu de victimes humaines, les dégâts matériels sont considérables. Des milliers de personnes sont déplacées en attendant la baisse des eaux.

Dans ces inondations qui, chaque année se répètent avec plus ou moins de gravité, ce n’est pas la nature qui est en cause mais l’incurie de l’État. Dans le cas de Grand Bassam, on sait depuis des dizaines d’année, qu’avec l’ensablement de l’embouchure de la Comoé, une partie de la ville finirait tôt ou tard sous les eaux en cas de forte pluviométrie. Pour parer à cela, il aurait fallu désensabler la jonction du fleuve et de la lagune afin de permettre aux eaux de crues de se jeter dans la mer. Il aurait fallu aussi construire des digues pour contenir les débordements du fleuve. Cela demande des travaux d’envergure et des investissements que les gouvernements successifs n’ont pas trouvés nécessaire jusqu’à présent. Le gouvernement actuel a préféré plutôt dépenser des milliards dans des travaux de prestige comme ceux de la transformation de la baie de Cocody en une marina.

Si Grand Bassam, pourtant classé au patrimoine mondial par l’Unesco et haut lieu de tourisme de la région abidjanaise, en est là, on imagine aisément ce qu’il en est des localités de moindre envergure. Les populations sont abandonnées à leur sort ; l’intervention de l’État se limite à des messages d’avertissement les invitant à libérer les endroits à risque. Mais pour aller où ? Là, les autorités restent muettes. C’est quand le drame survient que les dirigeants, tels des charognards, apparaissent sur les lieux du sinistre avec leur cortège de journalistes, plus pour se faire de la publicité que pour agir vraiment.

Dans ce monde capitaliste, la vie et la sécurité des petites gens ne comptent pas. Seul compte l’enrichissement de la petite minorité de parasites et d’exploiteurs dont font partie les hauts dignitaires de l’État et des régions. Quand il s’agit d’investissement pour permettre à de riches capitalistes de piller des ressources, l’État ne compte pas les dépenses. Là on parle même « d’intérêt national ». Mais pour l’épanouissement et le mieux-être des populations, surtout pauvres et laborieuses, l’État ne se résout à agir que s’il y est contraint par la mobilisation populaire, c’est-à-dire des dizaines, des centaines de milliers de personnes exprimant leur colère dans la rue et prêtes à en découdre avec les forces de l’ordre et les menaces de toutes sortes.