Après Compaoré c’est toujours la dictature qui continue
Burkina faso
Les dirigeants actuels du gouvernement de « transition » qui ont pris les rênes du pouvoir au Burkina Faso après la chute de l’ancien dictateur Blaise Compaoré, font beaucoup de cinéma autour de leur prétendue lutte contre la violence, la corruption et des malversations qui ont émaillé les 27 années de pouvoir de Compaoré. Ils sont d’autant plus prolixes en la matière que la population (notamment la jeunesse) qui s’est soulevée pour mettre fin au régime de Comparé n’a pas complètement baissé les bras et continue à faire pression sur le nouveau pouvoir pour mettre fin à l’impunité des crimes passés.
C’est sous la pression de cette jeunesse que les dirigeants actuels (dont le Premier ministre qui n’est autre que l’un des ex-bras droits de Blaise Compaoré) ont fini par demander, du bout des lèvres, l’extradition de l’ancien dictateur après l’avoir laissé partir en Côte d’Ivoire avec l’aide d’un commando de l’armée française. Après un court séjour à côté de son ami Ouattara, Compaoré a préféré partir un peu plus loin pour se réfugier à côté d’un autre « ami », le roi du Maroc. Autant dire que la demande d’extradition n’est que de pure forme et que ceux qui souhaitent son jugement resteront sur leur faim. Les nouvelles autorités veulent d’autant moins juger l’ancien dictateur qu’eux-mêmes, courent le risque de se faire éclabousser par les révélations qui pourraient en sortir.
Pour amuser la galerie, les dirigeants actuels ont accepté la demande de la famille et des partisans de Thomas Sankara (assassiné lors du putsch de Blaise Compaoré en octobre 1987) de refaire une « enquête » sur les circonstances de sa mort. Ils ont aussi consenti à refaire une enquête sur l’assassinat du journaliste Norbert Zongo tué le 13 décembre 1998 alors qu’il enquêtait sur le meurtre de David Ouédraogo, le chauffeur de François Compaoré, frère cadet de Blaise Compaoré.
Tout cela n’est que de la poudre aux yeux pour tenter de détourner l’attention de la jeunesse mobilisée et de canaliser leur colère vers des voies de garage. Il en va de même des prétendues enquêtes sur les malversations et les détournements des deniers publics auxquels se sont adonnés Compaoré et ses proches. Il faut rappeler que dans les années 1990, l’ancien dictateur avait procédé à une privatisation massive des sociétés d’État en prélevant sa propre part au passage. Sur la soixantaine d’entreprises d’États, seule une n’a pas été privatisée, la Société nationale burkinabè d’hydrocarbures (Sonabhy). C’est de cette manière que la famille et les proches de Compaoré se sont gavés. C’est ainsi, par exemple, que Alizeta Ouedraogo, appelée « la belle-mère nationale » s’était emparée de la Socogib (Société de construction et de gestion immobilière). Elle était devenue une des personnes les plus riches du pays et dirigeait la Chambre de commerce et d’industrie du Burkina Faso. Elle a fui le pays après la chute de son beau-fils, mais les dirigeants du pouvoir actuel ont déjà annoncé qu’ils n’ont pas l’intention de renationaliser sa société.
Ceux qui attendent de vrais changements au Burkina Faso n’ont aucune raison de faire faire confiance aux dirigeants actuels. Ceux-ci, dès qu’ils ont eu les coudées un peu plus franches ont interdit les manifestations de rues en demandant à la population de leur faire confiance. Pour apaiser la colère de la rue, les successeurs de Compaoré ont intégré en leur sein quelques têtes d’anciens opposants mais ce n’est qu’une tactique pour faire croire que les choses ont vraiment changé dans ce pays. La vérité c’est que la dictature continue.