Sénégal : face à la flambée des prix, les travailleurs ne peuvent compter que sur leurs luttes
Selon le classement établi par le cabinet Mercer (une entreprise américaine spécialisée dans ce genre d’étude utilisée par les grands investisseurs en Afrique et ailleurs) Dakar est devenue en 2022 la ville la plus chère de l’Afrique de l’Ouest, devant Abidjan. Le salaire moyen au Sénégal est estimé à un peu moins de 71 000 Francs Cfa (108 euros) par mois, c’est-à-dire qu’un grand nombre de personnes ne dispose pas de ce revenu moyen alors que l’inflation qui avait déjà atteint 11% en juillet 2022 (selon ce même cabinet) continue de grimper.
C’est une situation catastrophique pour des millions de personnes dans les villes et les campagnes. Les petits paysans déjà victimes de la sécheresse ont de plus en plus de mal à se nourrir. Ils quittent la campagne pour tenter de survivre en ville mais leur situation ne fait que s’aggraver à cause du chômage et des salaires de misère pour ceux qui parviennent à trouver un petit job. Leurs enfants voient leur avenir bouché et ne rêvent que de partir vers les pays riches dans l’espoir de pouvoir y tenter leur chance et de venir en aide à leurs parents en souffrance.
Cette situation de misère croissante est une menace pour le pouvoir de Macky Sall et il sait qu’il suffirait d’une étincelle pour que la colère longtemps retenue lui explose à la figure. C’est pour éviter une telle explosion sociale qu’il manie la carotte et le bâton. D’un côté il durcit son pouvoir en enfermant des journalistes qui ne lui plaisent pas et en envoyant la police pour réprimer violement les manifestations, particulièrement dans le milieu de la jeunesse et de l’autre, il fait beaucoup de démagogie pour faire croire à la population qu’il agit contre la flambée des prix.
Il annonce parfois des baisses de prix de certaines denrées mais c’est uniquement sur le papier car sur le terrain, les gens ne constatent rien. Pour s’en dédouaner, le gouvernement accuse les petits commerçants de ne pas appliquer ses consignes. En septembre dernier, Macky Sall a annoncé l’enrôlement de 1 000 jeunes volontaires pour contrôler les prix dans les marchés et chez les petits boutiquiers. C’est une manière de détourner la colère de la population vers ceux qui ne sont pas les vrais responsables de la cherté de la vie.
Le 5 novembre dernier, il a fait une nouvelle annonce de « 55 nouvelles mesures » prétendument destinées à entrainer « des baisses immédiates sur les prix des produits et services de consommation courante », et bla-bla-bla. Mais personne ne croit plus à ses mensonges.
Si le gouvernement était vraiment soucieux de combattre la cherté de la vie, il commencerait d’abord par augmenter les salaires des petits employés de l’État et par obliger les patrons du secteur privé à en faire autant, au moins pour rattraper ce que les travailleurs ont perdu depuis des années de blocage de salaire, aggravé par la flambée des prix qui a commencé dès 2019.
Ce qui est sûr c’est que les travailleurs n’ont rien à attendre des promesses de Macky Sall, pas plus qu’ils ne devraient faire confiance aux politiciens de l’opposition qui, tel qu’Ousmane Sonko, prétendent avoir des « contre-propositions » pour lutter contre la misère et la vie chère. Les travailleurs ne devront leur salut qu’à eux-mêmes, à leur capacité et à leur volonté de s’organiser pour obtenir des salaires permettant de vivre décemment de leur travail. Mais c’est un combat qui ne devrait pas s’arrêter là car ce que le gouvernement et le patronat accorderont d’une main aujourd’hui sera repris demain avec l’autre main. La classe capitaliste n’acceptera jamais de sacrifier ses profits et ce sera ainsi tant que les travailleurs n’auront pas renversé le système capitaliste pour exercer eux mêmes le pouvoir et mettre fin à toute forme d’exploitation de l’homme par l’homme.