Incurie de l’État dans le domaine des infrastructures et cadeaux aux patrons
Madagascar
Comme chaque année à pareille époque, la population pauvre s’apprête comme elle peut à faire face à la saison des pluies qui est en train de commencer. Ensuite il faudra affronter les tempêtes et les vents cycloniques.
Du côté du gouvernement, c’est le laisser aller qui prévaut. Il continue à laisser les gens se débrouiller par eux-mêmes et s’avère incapable de pourvoir aux besoins de la population en termes d’habitat, en termes de réfection des voies publiques, de réparation des routes et ponts dégradés depuis des années.
Par exemple un des grands axes routiers du pays en l’occurrence la RN4 qui relie Antananarivo à Mahajanga, est tellement dégradé surtout au niveau des ponts et viaducs, qu’il faut parfois plusieurs jours pour relier ces deux villes. Les structures métalliques des rambardes pour protéger le passage des véhicules et des piétons sont dans un tel état que des véhicules chargés de passagers ainsi que des charrettes basculent parfois dans le vide, faisant des morts et des blessés. Même les grands ponts qui enjambent les fleuves Betsiboka et Kamora sont dans un état piteux.
Des délégations de chefs des Fokontany (communautés régionales) font périodiquement le déplacement à la capitale pour faire en sorte que les pouvoirs publics écoutent leurs doléances et remédient de façon pérenne à cette situation catastrophique. Des rafistolages ponctuels et au compte goutes s’effectuent, puis la situation se dégrade à nouveau.
Les journaux du pays relatent ces situations dramatiques, mais certains d’entre eux assez liés aux pouvoirs publics dédouanent complètement ceux-ci. Par exemple le journal « L’Express de Madagascar » dans son édition du 11 novembre dernier affirme sans états d’âme que tout cela est de la faute des « vandales et voleurs (qui) ne laissent rien et arrachent tout ».
A l’autre bout du pays la situation n’est pas meilleure. La rivière Fiherena déborde périodiquement de son lit. A cause de la faiblesse d’une digue et de l’inexistence de canaux d’évacuation des eaux, les habitations des villages en contre bas ainsi que ceux des faubourgs de Toliara (chef lieu de province), sont chaque année plongées dans les eaux boueuses porteuses de maladies et de mort.
L’État prétend qu’il n’y a pas assez d’argent dans ses caisses pour répondre aux besoins de la population. Pourtant il ne refuse rien aux nantis qui exploitent sans vergogne les travailleurs. Dans le projet de loi des finances sur les « Zones Franches » c’est-à-dire les endroits dans lesquels les patrons bénéficient de conditions fiscales particulièrement avantageuses pour eux, il est affirmé que ceux-ci continueront à bénéficier d’une « période de grâce » pouvant aller jusqu’à 10 ans. Cependant, la Direction Générale des Impôts, dans le but de renflouer un peu les caisses de l’État en cette période de raréfaction de ses recettes a proposé que la réduction fiscale de 75% qui s’applique à eux par rapport aux investissements, soit portée à 25%. H.L Rakotoarisoa le président des patrons de ces zones a vite élevé le ton contre ce projet qu’il estime inacceptable. Une fois de plus la Direction générale des impôts a annoncé qu’elle ne maintiendrait pas son projet en l’état et qu’elle le réviserait sur les points contestés par le représentant patronal.
Les exigences patronales et la soumission des pouvoirs publics à leur égard ne s’arrêteront pas par un coup de baguette magique. À plusieurs reprises dans le passé les travailleurs et les classes pauvres de Madagascar ont fait preuve de conscience, de détermination et d’organisation face aux attaques et à l’arrogance patronales. La dégradation sans répit de la situation des travailleurs s’ajoutant à celle des infrastructures vitales pour la survie des classes pauvres, constituent un mélange détonnant dont devraient se méfier les patrons et les gouvernants à leur service.