Salaires de misère et gros profits !

26 mars 2020

ÉTHIOPIE

L’Éthiopie est considérée comme un des pays d’Afrique ayant un taux de croissance très élevé, de l’ordre de 9%. Le pays est essentiellement agricole, la majorité des 105 millions d’habitants étant des paysans. Depuis une dizaine d’années se construisent des usines autour de la capitale, Addis Abeba, et en province : à Bole Lemi, Mekele et Adama. À Hawassa, à 270 km au sud de la capitale, sur une superficie de 300 hectares, plusieurs usines emploient plus de 25 000 personnes, en majorité des femmes.

Dans le pays, il n’existe pas de salaire minimum imposé par l’État. Les patrons pratiquent leur propre loi. Les usines textiles, pour la plupart appartenant à des sociétés chinoises, fabriquent des habits pour les grandes marques comme H&M, Décathlon, Levis, Calvin Klein et d’autres.

Les conditions de travail sont extrêmement pénibles. À l’embauche, les retards ne sont pas du tout tolérés, les femmes sont auscultées pour vérifier qu’elles ne sont pas enceintes. On n’a pas le droit de parler à son voisin pendant le travail, ni de téléphoner. Les heures supplémentaires ne sont pas payées. Les patrons s’opposent à la création de syndicat dans l’usine. Mais les travailleurs n’acceptent pas des remarques désobligeantes.

Le plus révoltant, ce sont les salaires pratiqués dans ces usines. Le gouvernement, pour attirer les patrons chinois, indiens et autres, leur permet de payer les ouvriers aux plus bas salaires, avec bien d’autres avantages fiscaux pour s’installer dans le pays. Évidemment ils n’ont pas du tout hésité à ne payer que 23 euros par mois, salaire considéré comme le plus bas du monde. En Chine le salaire minimum est de 290 euros par mois. Au Bangladesh, c’est environ 86 Euros et au Kenya 220. Ainsi les capitalistes chinois et indiens n’ont pas hésité à délocaliser leurs usines textiles vers l’Éthiopie.

Les travailleurs de ces usines n’hésitent pas à manifester leur colère, souvent par des grèves. Il y en a qui finissent par se décourager et démissionner. Certains, d’origine paysanne, estiment qu’ils s’en sortiraient mieux en cultivant leurs lopins de terre qu’ils ont abandonnés.

Dans cette situation, certains patrons commencent à changer de méthode. Par exemple en donnant des primes pour ceux qui n’ont pas d’absence dans le mois. D’autres construisent des dortoirs proches des usines avec des primes pour le transport et la nourriture. Sous la pression des ouvriers, le gouvernement parle de la nécessité d’instaurer un salaire minimum dans le privé.

Les capitalistes affluent vers ce pays qui tente de se moderniser pour y faire des affaires juteuses. Que le nombre de travailleurs augmente dans ce pays est une bonne chose car cela augmente le camp des travailleurs et leur donnera plus de poids en cas de luttes sociales importantes.

Il faut espérer que les ouvriers du textile, avec ceux du reste du pays, réussiront à se doter d’une organisation qui représente vraiment les intérêts présents et futurs de l’ensemble des travailleurs face à leurs exploiteurs tout en combattant toutes formes de division ethnique ou religieuse qui ne feraient que les affaiblir.