Enseignants, élèves et cantines sont fictifs mais pas les milliards payés par l’État

12 mai 2018

Mali

Le ministre de l’Éducation nationale a récemment rendu public le résultat d’un recensement des enseignants au Mali. On y découvre que les écoles dites communautaires (c’est-à-dire les écoles privées ou religieuses) qui bénéficient d’une importante subvention de l’État ont gonflé le nombre des élèves et enseignants pour obtenir frauduleusement plus d’argent. Sur les 16 000 enseignants déclarés depuis 2016, 10 000 seraient fictifs, 3000 avec des faux diplômes. Les dirigeants de ces écoles auraient déclaré 5 000 élèves fantômes. Ces faux frais auraient occasionné une perte de 33 milliards de franc Cfa au Trésor public.

L’État malien a déboursé 3 milliards pour financer des cantines dans ces établissements privés mais le ministre a reconnu qu’il n’a vu aucune cantine opérationnelle lors des sa récente tournée.

Où est parti l’argent de la fraude ? Qui sont les responsables ? Là-dessus le ministre n’a pas ouvert sa bouche. Il existe parait-il une « commission » spécialement mise sur pied par l’État pour attribuer les subventions après vérification des dossiers. Le ministre a dit qu’il va mener une enquête et « nettoyer définitivement les fichiers ». Soyons sûr que cette enquête n’aboutira pas à grand-chose, tout au plus trouvera-t-on quelques lampistes pour leur faire porter le chapeau, histoire de dire que l’État fait le ménage.

Ce qui vient d’être révélé dans l’Éducation nationale n’est pas une nouveauté ; ce n’est qu’une infime partie du détournement de l’argent public. Combien y a-t-il de faux généraux ou faux colonels dans l’armée et dans la gendarmerie ? Combien sont les hauts fonctionnaires fictifs dont les salaires sont pourtant versés on ne sait à qui ? Ce sont des milliards qui s’évaporent des caisses de l’État au profit de quelques margoulins haut placés. À ces milliards, il faut ajouter l’argent prélevé directement par les tenants du pouvoir.

On ne peut pas attendre de ces gens qui sont au sommet de l’État une quelconque intention de mettre fin à ce genre de fraude car c’est une des sources d’enrichissement de leurs clans. Seule la prise en main du pouvoir politique par les travailleurs avec la participation active de la population pauvre pourrait mettre fin à la dilapidation de l’argent public par le clan des maffieux au pouvoir.

ERRATUM

Dans l’article sur le Mali de notre précédant numéro du 8 avril dernier, nous avons écrit dans le 4ème paragraphe de la page 2 : « Si dans de nombreuses régions du Mali, notamment au Nord et au Sud, des populations manifestent un sentiment d’hostilité … ». Nous aurions dû écrire au « Nord et au Centre ». Nous nous en excusons auprès de nos lecteurs.