Les préoccupations du président ne sont pas celles des travailleurs
Madagascar
En ce début d’année nouvelle, le chef d’État malgache a voulu montrer qu’il se soucie des sans abris et des pauvres. Il a effectué une petite visite dans un quartier insalubre d’Antananarivo appelé « La Réunion kely » et distribué un peu de nourriture à des familles qui y vivent dans la misère à proximité des bennes à ordures non ramassées en putréfaction en cette saison pluvieuse. Comme à son habitude, il n’a pas été avare de promesses en tous genres, celle notamment d’un enlèvement imminent des bennes remplies et du nettoyage des détritus facteurs de prolifération des rats, responsables des épidémies telle que la peste.
Il a aussi rendu visite aux sans-abris qui ont élu domicile à l’intérieur des deux tunnels de la capitale. Quelques paniers de victuailles ont été distribués et les images ont été reprises en boucle par les télévisions. Les familles qui n’ont pas d’autre choix que celui d’habiter ces lieux de façon permanente, ont reçu la promesse d’avoir leur frais de transport remboursé si elles choisissaient de retourner vivre dans les villages qu’elles ont quittés, chassées par la misère qui sévit gravement dans les campagnes. Comme s’il suffisait de cette somme dérisoire pour que leur éventuelle existence campagnarde devienne à nouveau viable.
Peu de temps avant que le président ne multiplie aumônes, paroles mielleuses et bonnes actions, plusieurs centaines de travailleurs de deux sociétés de textile situées dans la zone franche d’Andraharo, venaient d’être jetés à la rue sous prétexte de carnets de commandes insuffisamment remplis. Les représentants des travailleurs accompagnés par des responsables syndicaux, ont tenté d’être reçus par les représentants de l’État pour leur expliquer leur situation, mais ils n’ont trouvé que portes closes et des forces de répression pour les disperser sans ménagement.
D’ailleurs la férocité des patrons des entreprises du textile à l’égard de leurs salariés n’est pas chose nouvelle. Certaines sociétés affichent une prospérité florissante.
C’est par exemple le cas de Soniamada qui fait partie d’un grand groupe à l’échelle de l’Océan Indien avec des ramifications sur le continent africain. Cela ne les empêche pas de procéder périodiquement à des « dégraissages d’effectifs ». Ils jettent à la rue les travailleurs les plus vulnérables à commencer par ceux qui sont usés par le travail, estimés moins productifs. Ils se débarrassent aussi de ceux qui arrivent en fin de contrat d’essai, pour, quelque temps après, en embaucher des nouveaux plus frais et valides, avec des salaires et des contrats toujours révisés à la baisse.
Les patrons profitent de la période actuelle de crise, en ce moment difficile où le chômage frappe fort et où ils rencontrent peu de résistance organisée de la part des travailleurs, pour imposer des conditions de travail démentes. De nombreux avantages qui existaient il y a quelque temps tel que le 13ème mois ou des primes à l’intéressement, sont remis en question. Dans le même temps les prix des denrées de base et particulièrement celui riz, flambent. Ce phénomène sera accentué de façon conséquente rapidement puisqu’une augmentation importante de la taxe sur les carburants va entrer en application dès le début de cette nouvelle année et entraînera par voie de conséquence une hausse brutale des prix de toutes les denrées.
La pauvreté qui frappe de plus en plus fort sur les ménages et la détérioration des conditions de vie des classes pauvres, ne semblent pas faire partie des préoccupations des gens qui gouvernent. La seule chose qui compte pour eux c’est d’essayer de se faire élire à nouveau en 2018 car cette année est celle des élections présidentielles et législatives. Le président est dans les rangs ainsi que ses adversaires des grands partis de gouvernement. Les uns comme les autres se trouvent déjà en précampagne électorale et multiplient les discours démagogiques suivis de quelques actes symboliques, susceptibles de leur point de vue de les porter ou de les maintenir au pouvoir.
Espérons qu’en cette nouvelle année, les travailleurs aussi bien malgaches que ceux des autres pays, renouent avec la conscience de leurs intérêts de classe et leurs traditions de lutte, pour faire en sorte qu’ils ne soient pas continuellement sacrifiés sur l’autel des profits patronaux.