À bas le système journalier !
Le quotidien des travailleurs
Le système journalier s’est généralisé dans les zones industrielles. Avant, c’était l’exception, aujourd’hui c’est devenu la règle. Les embauches se font au compte-gouttes. Les travailleurs journaliers constituent l’écrasante majorité dans ces zones. Le patronat a trouvé là le moyen d’enfoncer un peu plus la classe ouvrière dans la précarité tout en s’en mettant plein les poches. Les travailleurs journaliers constituent une main d’œuvre corvéable à merci. Pour eux, ce sont des salaires au rabais, il n’y a pas de retraite, pas de CNPS, pas de matériel de protection, pas de prise en charge en cas de maladie. Le patron peut se débarrasser d’eux à tout moment et pour n’importe quel motif.
À ce sujet voici le témoignage d’un jeune travailleur journalier.
« Je suis journalier depuis quelques années. J’ai commencé à chercher du travail car ayant fini les études à l’université, je voulais gagner de l’argent pour passer des concours. Mon premier contrat, c’était à Rodis, une entreprise de plastique dans la zone industrielle de Yopougon. Le contrat était de trois mois non renouvelable. Pour l’avoir, il a fallu mouiller la barbe d’un chef recruteur. Autrement ce n’est pas possible d’avoir une place à moins d’avoir un parent corps habillé un peu gradé qui te parraine. Une fois à l’intérieur, il n’y a pas de tenue de travail, ni équipement de sécurité pour les journaliers. Il n’y a pas de bulletin de salaire. L’épée de Damoclès du renvoi pendait sur nos têtes à tout moment. Certains collègues ont été renvoyés après seulement quelques jours de travail. Ils n’ont même pas pu récupérer ce qu’ils ont payé pour se faire embaucher.…
Ensuite je me suis retrouvé à Sivop Plastique. Là aussi j’ai dû payer pour avoir une place cette fois-ci pour un contrat de 11 mois. Avant de commencer à travailler, la direction exige de l’ouvrier de se munir de chaussures de sécurité, mais à ses frais. C’est au travailleur d’acheter sa tenue de travail qui est confectionnée par l’entreprise. Là, les conditions de travail étaient difficiles. En plus de la cadence infernale, il y a la chaleur et le bruit. On n’avait rien pour s’en prémunir. À la descente, on était trempés comme si on venait de jouer un derby. Lorsque tu tombes malade, tes soins sont à tes frais. Les jours non travaillés ne sont pas payés. Mais à ton retour la direction demande des justificatifs comme les reçus d’hôpital, et même les reçus de pharmacie, autrement c’est le renvoi.
Après les 11 mois, j’ai fait trois mois de chômage et j’ai trouvé un point de chute à Siprochim. Là encore il fallait payer. Avant d’être pris, la direction exige un certain nombre de vaccins mais au frais de l’ouvrier. Le salaire est tellement bas qu’il ne permet même pas de faire les économies escomptées.
Aujourd’hui, je me retrouve dans une nouvelle entreprise, toujours dans les mêmes conditions.
Ainsi va la vie pour les travailleurs journaliers. Nous allons d’entreprise en entreprise. Nous vivons dans l’insécurité du lendemain car le renvoi peut arriver à tout moment. Même lorsqu’il n’y a pas de renvoi, c’est tout comme puisque de toute façon les contrats sont de courte durée.
Nombreux sont les travailleurs qui en ont marre de ce système qui n’est rien d’autre qu’un esclavage qui ne dit pas son nom. Tôt ou tard cette situation finira par exploser car ça ne peut pas durer ainsi indéfiniment. »