Éditorial

Le retour de la guerre civile de 2010 est loin d’être imaginaire !

04 mars 2020

Les gens du pouvoir nous expliquent aujourd’hui que ce qui s’est passé en 2010 ne peut pas se reproduire en 2020, quelle que soit la gravité de la crise entre les différents prétendants à la mangeoire.

Rappelons que ce qui avait entrainé les massacres des populations en 2010, c’était le fait que ceux qui étaient au pouvoir et qui étaient là avant tout pour « manger », ne voulaient pas céder leurs places juteuses à d’autres.

Aujourd’hui, 10 ans après, ce sont les partis de Bédié, de Laurent Gbagbo, de Soro Guillaume et de leurs alliés qui veulent eux aussi passer ou repasser à la soupe. Et c’est le clan de Ouattara qui ne veut pas quitter la marmite. Leurs opposants les accusent d’avoir verrouillé la Commission Électorale Indépendante (CEI), comme l’avait fait en son temps Gbagbo.

Les défenseurs du pouvoir actuel nous expliquent que là s’arrêtent la ressemblance entre 2010 et 2020. La grande différence, selon eux, c’est qu’en 2010, Gbagbo avait instrumentalisé l’armée et créé ses propres milices tandis qu’à l’opposé, Soro Guillaume et ses alliés avaient fait de même. Aujourd’hui, toujours selon eux, aucune milice n’existerait dans le pays. De même qu’aucun pays limitrophe de la Côte d’Ivoire n’abriterait des forces armées susceptibles d’attaquer le pouvoir en place. Guillaume Soro, lui-même, vivant aujourd’hui en exil loin en Europe, ne pourrait diriger une quelconque milice armée.

Continuant dans ce raisonnement, ces défenseurs du pouvoir actuel nous disent que la majorité des opposants actuels qui font du bruit, baisseront leurs ardeurs aux lendemains des législatives qui suivront les présidentielles, en échange de quelques strapontins ministériels. Cela est possible mais rien ne dit qu’il y aura une place au soleil pour tous les prétendants et que ceux-ci ne seront pas tentés de recommencer à mettre le pays à feu et à sang pour parvenir à leurs fins. Ces politiciens, ceux du pouvoir comme ceux de l’opposition actuelle, ont déjà démontré qu’ils sont capables du pire pour se hisser ou se maintenir au sommet du pouvoir. Croire qu’ils ont changé serait une erreur.

L’armée actuelle, elle-même, peut une nouvelle fois se scinder en deux, voire en trois et rejoindre un des camps en fonction de leur ethnie ou de leur région. Quant aux milices armées, chacun sait qu’avec le chômage et la misère, ces choses-là peuvent se monter en un rien de temps. De surcroît, ce ne sont pas les armes qui manquent dans ce pays !

Ce qui est certain c’est que, comme en 2010, si les populations pauvres laissent tous ces gens distiller encore une fois la haine, l’ethnisme et la xénophobie, dans leur villes, villages, quartiers ou cours communes, sans s’y opposer, ils risquent de payer chèrement les conséquences de cette rivalité entre clans de politiciens assoiffés de pouvoir.