Éditorial

Les laissés pour compte de l’émergence de 2020

24 mars 2015

Éditorial

 

En cette période de précampagne électorale, le gouvernement ne rate pas une occasion pour s’auto-glorifier par rapport aux grands travaux déjà réalisés, ceux qui sont en cours de réalisation, ainsi que les projets à venir. Ce sont des ponts, des routes, des centrales thermiques et hydrauliques, des barrages, des nouvelles zones industrielles, ou encore l’extension du port d’Abidjan, etc. La bourgeoisie attendait ces investissements depuis des années. Elle est bien servie, sans qu’elle ait à débourser un seul sou !

Du côté des travailleurs et des populations pauvres, ils ne peuvent pas en dire autant. C’est même le contraire. Ainsi, par exemple, ceux d’entre eux qui se débrouillaient en créant une petite activité sur les trottoirs, faute de mieux, en ont été chassés, leur échoppe détruite. Pourtant, c’est cette activité qui leur permettait de ne pas tomber encore un peu plus dans la misère. Comme si ça ne satisfaisait pas encore les riches, le pouvoir a ensuite carrément chassé les habitants des quartiers pauvres, les uns après les autres. Ces quartiers ont été détruits à leur tour à coup de bulldozers. Aucune commune n’a été épargnée : Port-Bouët, Yopougon, Abobo, Williamsville, Attecoubé et tout dernièrement, Cocody, avec la destruction de Gobelet, qui comptait, dit-on, à lui tout seul, près de 70 mille habitants. Les victimes de ces destructions massives ne savent plus où aller vivre dans ces ruines. Heureusement que beaucoup d’entre eux ont trouvé la solidarité d’autres pauvres comme eux qui les ont recueillis en se serrant un peu plus. D’autres sont allés s’installer dans des bidonvilles encore plus loin, aggravant du même coup leur situation déjà difficile. Les riches sont avides de terrains constructibles. Le gouvernement œuvre pour eux.

Toujours non satisfait, le gouvernement veut maintenant ponctionner la somme de 1000 Fr par mois à chaque habitant âgés de plus de 5 ans, y compris sur les populations pauvres, pour soi-disant financer l’AMU (l’Assurance Maladie Universelle). Comme si les riches ne pouvaient pas sortir de leurs comptes en banque biens garnis l’argent nécessaire pour financer ce projet ! Personne n’ignore que les hôpitaux publics, là où il en existe, sont des mouroirs pour pauvres. Le personnel y est en sous-effectif et mal payé. Alors au lieu de vouloir faire payer les pauvres, le gouvernement ferait mieux de régler d’abord ces problèmes-là.

Mais ce n’est même pas sa préoccupation ! Depuis début mars, par exemple, les femmes de salle, les brancardiers, les ambulanciers et autres personnels administratifs des hôpitaux sont en grève pour revendiquer de meilleurs salaires et l’amélioration de leurs conditions de travail. La seule réponse du gouvernement a été de leur distribuer des coups de matraques et les enfumer de bombes lacrymogènes.

C’est le même langage que le gouvernement tient contre les enseignants qui sont aussi en grève. Ils ne font, pourtant, que réclamer l’application d’une révision indiciaire qui leur est due, ainsi que le paiement d’arriérés que le gouvernement leur doit.

Pour le gouvernement, il n’y a pas d’argent pour ceux qui travaillent à des choses utiles. Par contre, il y en a pour les riches et les forces armées. Ces derniers sont d’autant plus choyés qu’ils sont en réalité payés pour mater toute éventuelle révolte des travailleurs et des populations pauvres contre les riches.

On voit à quel point leur prétendue « émergence 2020 », sera uniquement au profit des riches et se fera sur la peau des travailleurs et des populations pauvres si ceux-ci se laissent faire.